« Dernière séance », de Roland Sadaune

Critique de le 12 novembre 2013

Je n‘ai pas aimé...Plutôt déçu...Intéressant...Très bon livre !A lire absolument ! (4 votes, moyenne: 3,75 / 5)
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Roman

Avant d’ouvrir ce polar et de tourner les premières pages, le lecteur aura déjà l’occasion d’en avoir plein les yeux! Et oui, Roland Sadaune manie la plume, bien sûr, mais aussi le pinceau; la couverture de son roman en devient déjà toute une oeuvre en elle-même.

Appréciable, évidemment, d’autant plus que ses travaux sont d’un dynamisme et d’une intensité assez impressionnants. Ici, la façade du cinéma Palace, à Beaumont-sur-Oise, au nord de Paris.

Je profite pour vous transmettre le lien qui mène vers l’univers de l’auteur, un endroit où vous pourrez découvrir ses polars mais aussi apprécier ses oeuvres, un dégradé de tons obscurs.

http://www.polaroland-sadaune.com/

Sadaune2013Je tiens à relever la belle prestation de Sadaune concernant ses personnages. Je faisais référence avant au dynamisme qui ressort de ses tableaux; je retrouve également cette qualité dans l’épaisseur de ses personnages. Lors d’un entretien avec l’auteur, effectué au mois d’octobre 2011, nous avions parlé de l’aspect des personnages, justement. Roland m’avait dit ceci: « L’épaisseur des personnages est primordiale, surtout pour le personnage central. Ne pas oublier qu’il a vécu avant le livre. Sa barque doit être remplie, ainsi il traversera l’histoire avec la crainte de couler et n’en sera que plus intéressant. ».

Ne pas oublier qu’il a vécu avant le livre. Je trouve cette remarque très pertinente et je ne m’étais jamais demandé ce qu’était un personnage avant le livre et ce qu’il deviendra après. Depuis, c’est une question que je me pose assez souvent. Dans ce polar justement, Roland Sadaune ne déroge pas à la règle et la qualité de ses personnages s’en ressent pleinement. Pour moi, lorsque cette attente est réalisée, je suis déjà au 3/4 conquis.

Après encore faut-il trouver une bonne histoire à raconter. Dans celle-ci, nous sommes très vite dans le vif du sujet, témoins du kidnapping en pleine rue d’un homme d’un certain âge; un collectionneur, amateur de cinéma. Le 7ème Art sera le dénominateur commun de la première à la dernière page! Et oui, Roland Sadaune est écrivain, peintre, mais aussi un passionné – amoureux! – de cinéma depuis son plus jeune âge! Fanatique?

Capitaine de police au 36, Quai des Orfèvres, Jean-François Murray – Jeff – grand amateur de cinéma, tiens donc, et de lecture, re-tiens donc, est un flic au passé difficile. Un passé qu’aucun père de famille ne voudrait avoir derrière lui. Un homme s’obligeant à s’enfouir très profondément dans l’univers de ses passions pour atténuer, un temps soit peu, un chagrin perpétuel qui perdure depuis cinq ans. Une douleur qui s’est immiscée dans son existence lorsque sa femme et sa petite fille se sont fait heurter par un chauffard devant ses yeux, devant leur maison. Mortes. Peut-être trois morts ce jour-là, lui compris…

Mais Jean-François Murray, se l’avouant peut-être un peu moins, se réfugie peut-être également dans un autre domaine, son job. Un travail qu’il effectue avec une certaine rigueur, sans pour autant être un super héros. Roland Sadaune nous dépeint un flic juste, avec un esprit d’équipe considérable et une force de caractère bien présente. Peut-être une façon d’avancer sans trop souvent se retourner…

Alors pas trop le temps de se morfondre en cette période de canicule qui frappe la capitale française; un macchabée a été retrouvé à Paris-Plages. Il s’agit d’un certain Bernard Kalers, la soixantaine, ayant travaillé dans une cinémathèque et plus récemment au Centre de l’Image. Blessé à la tête, le malheureux a été balancé par dessus une balustrade et a atterri sur cette fameuse plage éphémère au bord de la Seine, espace aménagé durant la période estivale à Paris. Il s’est même « mangé » un bout du château Disney; pour celles et ceux qui connaissent, nous sommes donc en 2011, sauf erreur…

A en croire ce récit, il devait faire chaud dans la région parisienne, très chaud même; auréoles sous les aisselles, odeurs de transpiration, gouttes perlant sur les fronts, descentes de litres de bières, mais aussi, et surtout, une chaleur à faire naître les instincts les plus cruels.

Lors de ce début d’enquête un peu boiteux, un deuxième homicide perpétré dans une cabine d’essayage d’une boutique de vêtements ne va pas déstresser notre flic qui a déjà bien du mal à démarrer. D’autant plus qu’un élément relativement désagréable va s’ajouter à la liste des emmerdes; Murray se fait personnellement harceler et mener en bateau par un type qui a l’air d’en connaître un rayon sur sa personne, mais aussi sur le meurtre de Bernard Kalers. Mieux, il doit certainement s’agir de l’auteur, lui-même.

Mais le destin a décidé que la situation était encore un peu trop simple et gérable pour Murray; donc un cadavre de femme retrouvée dans un caddie sur le parking d’un magasin d’alimentation va rendre cette situation encore un peu plus préoccupante. Notre flic du 36 sature, il est même un peu perdu. C’est ça la réalité non?

Après avoir bien pataugé dans une semoule un peu trop liquide, Jeff Murray et ses enquêteurs vont enfin apercevoir une lueur au bout de ce tunnel très mal éclairé; un lien se crée enfin dans le cadre de cette affaire sordide. Une relation qui mène vers la première victime, soit un lien qui mène immanquablement vers le monde du cinéma. Mais est-ce vraiment dans cet univers que tout commence?

 

Connaître quel est l’origine de toutes ces mises en scène macabres, on ne le saura pas tout de suite, évidemment. L’auteur nous garde cela bien au chaud. Par contre, ce que l’on sait, c’est qu’un individu va continuer à lâcher dans Paris des cadavres dans des lieux bien précis. Les scènes de crime vont s’avérer être très importantes pour lui. Enfin peut-être…
Pour Jeff Murray, cette affaire va devenir de plus en plus personnelle et intime.

Vous l’aurez compris, avec Roland Sadaune à la plume, tout tourne autour du 7ème Art. Ce passionné de cinéma vous donnera tout de sa personne pour vous transmettre son savoir, mais aussi pour vous faire ressentir sa passion.

Ce roman ne se dévore pas, il se déguste, comme un excellent vin. Lors de la lecture, nous ne voulons pas arriver trop vite à la fin, comme nous ne voulons pas arriver à la dernière goutte d’un bon Bordeaux; alors on traîne, volontairement, et on apprécie! Mais on s’active tout de même un peu car on désire connaître le dénouement que nous a réservé l’artiste! Un peu paradoxale tout ceci.

Roland Sadaune, dans ce polar, nous démontre comment la vengeance peut être parfois surprenante, aléatoire et imprévisible; il nous révèle de quelle manière un homme offensé, pas trop calculateur, peut faire face à un affront en commettant des actes irréfléchis et, surtout, en choisissant une cible qui n’est pas vraiment judicieuse, sauf pour lui-même bien sûr. Si on suit le raisonnement qui nous est amené ici, nous pouvons imaginer que notre cerveau, se sentant martyrisé, peut nous dicter une certaine marche à suivre passablement curieuse, illogique et déroutante. Ce que l’on pourrait peut-être appeler une idée fixe, respectivement une grave erreur de jugement.

Jeff Murray, notre enquêteur, va en être l’épicentre. Concernant ce personnage, Roland Sadaune vous livrera son intimité sans retenu, vous emmenant dans son jardin secret, très secret, en vous plaçant face à une âme perdue, peut-être, d’un père de famille qui n’a plus trop de repères affectifs. Même une femme, vous verrez, aura du mal à s’introduire dans son antre, son sanctuaire dédié à son passé, à son amour effacé, gommé de sa vie d’un trait trop rapide.

« Ne pas oublier qu’un personnage a vécu avant le livre »; personnellement, je ne l’oublie pas.

Ce que je n’oublie pas non plus, c’est de vous mettre le lien de l’entretien dont je vous ai parlé avant, il est sympa!

Entretien avec l’artiste!

Bonne lecture.

Détails sur « Dernière séance », de Roland Sadaune

Isbn : Roland Sadaune

« Dernière séance », de Roland Sadaune

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